La lecture de comics, anciens comme récents, fait partie intégrante de mon quotidien. Lorsque j'ai appris que Delcourt allait sortir la mini-série MURDER FALCON, mon sang n'a fait qu'un tour. En effet ce récit dispose de plusieurs atouts dans sa besace : il est initialement sorti chez Image Comics qui, pour moi, reste un gage de qualité et d'innovation (les 30-40 ans se souviennent surement de l'arrivée fracassante de cette maison d'édition en France avec des titres cultes comme Spawn, WildC.A.T.S, Cyberforce, Youngblood, The Savage Dragon, Gen 13…) ; il a pour thématique centrale le Metal et sa « mythologie » (ce qui fait que l'on en parle aujourd'hui sur Blastphème) ; et surtout on ne s'ennuie pas une seconde à la lecture des 206 pages (récit complet).
Mon précieux arrive enfin entre mes mains le mercredi 09 septembre après un report suite au Covid…décidemment ce virus est une calamité pour la Culture.
J'en profite pour saluer le libraire BULLE EN STOCK sur Amiens où l'on trouve toujours son bonheur (on a l'embarras du choix^^), en plus d'un accueil chaleureux et des conseils avisés.
Pour en revenir au livre, je vais tenter d'éviter au maximum de vous spoiler les happenings tant ils sont fondamentaux dans le déroulé de l'histoire.
Le héros, Jake, est un guitariste sans groupe (il a quitté Brooticus) et nous semble solitaire, paumé, dépressif et marginalisé. D'ailleurs il n'a pas touché sa guitare depuis plus d'un an, instrument qu'il a cassé suite à un événement personnel (qui a chamboulé la personnalité de Jake). Un soir, en rentrant chez lui, il est attaqué par un monstre (une sorte d'insecte géant). Pour se défendre, il se saisit du manche sa guitare endommagée, guitare qui se transforme et fait apparaitre un être d'essence divine, le « Murder Falcon » venu de la dimension du Heavy.
Ce volatile (faucon) bodybuildé, avec un bras robotique, lui demande de jouer de la guitare pour combattre le monstre car la puissance du Metal le transcende. Jake va alors enchaîner quelques riffs et solos pour atomiser ce « veldar ».
A l'issue du combat victorieux, « Murf » (Murder Falcon) informe Jake de la terrible réalité : une faille a été ouverte vers une dimension de peur, de haine et de chaos où le « Magnum Khaos », une entité malfaisante, règne en despote et souhaite envahir la Terre pour la soumettre en esclavage. Pour cela il envoie des Veldar, des monstres à l'allure démoniaque qui détruisent tout sur leur passage. à‡a va cogner !!!
Pour terrasser ces immondices, Jake fera équipe avec Murf qu'il dirigera en jouant live de son instrument fétiche, un peu comme les pilotes de Jaegers dans Pacifique Rim, ou Hugh Jackman avec ses robots dans Real Steel. Quant aux bastons, elles sont épiques et colossales ; on peut penser au manga One Punch Man car l'environnement subit également des dommages conséquents lors de ces confrontations. Enfin, visuellement, les personnages humains sont dessinés de manières assez réalistes (on est plus proches de Kick Ass que des Avengers). Les héros ne sont pas des surhommes, ils saignent, ils ont des doutes…bref ils nous ressemblent.
Bien entendu, tout n'est pas parfait, notamment en matière de clichés : Murf qui après un combat hurle « apéro », le groupe de black coincé dans la dimension maléfique, l'échange sur St Anger chez le disquaire, le café comme nectar des dieux, les hommages prévisibles à Lemmy et à Dio, un mammouth qui se prénomme Halford, l'affrontement final est « le dernier rappel »â€¦ Mais ils sont contrebalancés par d'autres clins d'Å“il bien plus appréciables : le van qui ressemble au van de l'Agence Tous Risques (The A Team), le principe du shred detector fait penser au détecteur de boules de cristal de la saga Dragon Ball, un possible clin d'Å“il au S&M de Metallica avec les musiciens japonais…
Pour anéantir la menace de Magnum Khaos, Jake et Murf doivent réunir Brooticus, le groupe originel de Jake qui dispose de bien plus de fans que ce que l'on pourrait croire. Chaque membre a un instrument magique qui lui est destiné, ainsi qu'un « animal divin totem ». Au fil du récit, le power trio originel sera rejoint par d'autres membres plus ou moins inattendus. Les personnages sont différents, attachants, avec des motivations qui leur sont propres, et ce malgré un passé commun. Tout cela diversifié et bonifie les enjeux narratifs.
Car ce que l'on retient surtout de cette Å“uvre, c'est le parcours (initiatique, chemin de croix…à vous de voir ^^) de ce héros, « héros malgré lui » je serai presque tenté de dire (il a été choisi par une puissance supérieure, il ne l'a pas voulu). L'histoire se veut bien plus sérieuse que ce que l'on aurait pu croire, à l'opposé de l'animé Dethklok volontairement parodique par exemple. L'auteur s'attarde sur les failles de ses protagonistes, sur leurs pensées, angoisses et craintes. En cela, il va au moins aussi loin que Kiminori Wakasugi dans son manga Detroit Metal City (où la dualité de Sôichi Negishi / Johannes Krauser II était plutôt bien développée). Ici il est question de sacrifice, de pardon, d'acceptation, de renonciation, d'abandon, d'égo, d'adieu, de courage, de combattivité et de rédemption. Des messages bien plus profonds que ce les couvertures laissent penser.
Oui je reste volontairement assez vague, un peu à la surface des choses car si je détaille un peu plus l'histoire, vous risquez de deviner ou du moins de vous douter de certains twists. En tout cas je vous recommande fortement la lecture de ce comics qui a plusieurs degrés de lecture. A noter que l'édition de Delcourt contient les 8 pochettes hommages à des albums cultes pour bon nombres de metalheads.
Bonne lecture.