Chers amis, ce n'est pas avec mes petites pattounes de chroniqueur que je vais pouvoir faire changer le cours des choses, j'ai cependant à coeur de pointer du doigts par cet article une injustice.
S'il est question d'horreur en littérature contemporaine, tout le monde n'a qu'un nom à la bouche : King. Après tout, c'est vrai, le sieur, véritable machine à écrire humaine, est devenu comme une sorte de "nom tampon" de l'horreur en bonne société. Malgré tout, si l'on ne peut pas nier l'impact du King sur la littérature et le septième art, avec des romans et des films que j'ai aimé, probablement vous aussi ; je ne peux pas m'empêcher de trouver dommage l'immense arbre cachant une épaisse forêt que l'auteur constitue. Au mieux, certains profanes auront entendu parler de Clive Barker aussi, et la conversation commencera à s'élargir. Mais il manque à mon goût bien des noms qui mériteraient d'avoir autant de reconnaissance, y compris en termes d'adaptation filmique. Parmi eux, Graham Masterton.
C'est la deuxième fois que je vous en parle dans les pages de Blastphème, la dernière fois remontant au génialissime "Le Diable en Gris" que j'ai dévoré. Cette fois, je reviens avec un autre livre que j'aurais savouré avec délectation : La Maison aux Cent Murmures, son dernier en date.
Très vite, on se retrouve dans une histoire qui fait un peu penser au film l'orphelinat, avec une intrigue criminelle en filigrane : le père d'un graphiste free-lance se fait assassiner à coup de marteau dans sa demeure, un vieux manoir anglais. La famille rapplique pour discuter enquête et héritage. Mais voilà , Timmy, le fils de notre protagoniste, disparait mystérieusement, sans laisser la moindre trace. Les équipes de recherches se succèdent, et toujours rien. Dévorés par l'inquiétude, les membres de la famille restent loger dans le manoir, dans lequel de plus en plus d'événements étranges vont avoir lieu.
Disons-le, on tient là une histoire de maison hantée somme toute peu innovante dans la mesure où "La Maison aux Cent Murmures" manipules des concepts déjà mille fois vus, avec des personnages archétypaux, des manifestations surnaturelles assez connues ; cependant, Masterton exécute la chose d'une main de maître.
Il faut commencer par dire que le livre est très agréable à lire. Le style est fluide.
Ensuite, le contexte dans lequel l'histoire se passe, une campagne reculée de Grande Bretagne, contribue à créer suffisamment d'étrangeté et d'exotisme pour être appétissant. J'ai notamment beaucoup apprécié la part donnée au folklore local, qui fait ressentir tout le charme du surnaturel gothique à l'anglaise. Avec ce livre j'ai retrouvé le plaisir de certaines vieilles amours de lecture, notamment un roman de Wiltod Gombrowicz qui a particulièrement nourri mon amour de la lecture : Les Envoutés. L'atmosphère est bien mise en oeuvre, l'angoisse tenant parfois à une ligne à la volée en fin de chapitre.
Ensuite, la manière de créer la hantise dans ce roman demeure assez inhabituelle, avec un petit quelque chose de Doctor Who et de Prince of Darkness dans le rapport à l'espace et au temps. Ajoutez à ça le fait que les fantômes de la maison ont des propriétés un peu particulières ; ainsi qu'une entité plus puissante dont les spectres eux-mêmes ont peur, et on obtiendrait presque même un petit air de "Shining".
Enfin, je disais que certaines figures étaient assez connues dans ce genre du roman ; au hasard, celle du medium, de l'exorciste, du flic sceptique... Malgré tout, le roman trouve sa fraicheur dans le connu par le fait que ces personnages nous apparaissent sous un jour plus neuf. On les perçoit plus comme des individus que comme des personnages, ils ne partagent pas les destins de leurs prédécesseurs de fiction, endossent des rôles nouveaux.
On notera également un final à la fois prévisible mais en même temps très satisfaisant qui vous fera fermer le livre avec un sourire malicieux sur les lèvres.
C'est ma foi une façon fort convenable de dépenser son temps que de le déverser dans ce bon roman d'épouvante.