Interview de Thomas du groupe WNTRHLTR

Ce n'est pas tous les jours qu'un album dans son ensemble, musicalement et les lyriques, propulse à son maximum toutes vos émotions personnelles. wntrhltr arrive à cela dans un style unique, après une chronique, il en fallait plus, donc voici l'interview de Thomas, leader du groupe.

MIKA : Tout d'abord un grand merci pour cette interview pour Blastpheme webzine, pourriez-vous vous présenter pour nos lecteurs ?

Thomas : Avec plaisir ! Merci à vous. Je suis Thomas, à l'origine du projet WNTRHLTR ! Actuellement, je joue de la guitare et je chante dans le groupe.

M : Avant de parler de votre fabuleux album « Deu.Ils », comment est né chez vous l'amour de faire de la musique et d'en écouter ?

T : MERCI !

J'ai toujours baigné dans la musique, mon grand-père était un grand fan de musique classique et de chanson française à textes, il composait également des morceaux pour le groupe de rock/folk de mes oncles. Il y a des musiciens dans chaque partie de la famille, mon frère joue du saxophone, un cousin de la batterie (vous connaissez d'ailleurs surement le groupe dans lequel il officie -> Alcest), une cousine de l'accordéon, de la basse et de la guitare, mes oncles de la guitare, etc.

Difficile de ne pas être ouvert et sensible à la musique dans cette configuration-là ! J'ai eu la chance de pouvoir me former à presque tous les styles de base et ma curiosité m'a poussé à creuser dans des styles « de niche ». Je ne pourrais pas imaginer ma vie sans écouter de musiqueâ€¦

M : J'ai ressenti tellement d'émotions dans votre album, entre tristesse et colère, puis j'ai su que ce disque était dédié à votre père décédéâ€¦. Comment s'est déroulée la composition de celui-ci ? Avez-vous conscience que cela peut aider et toucher d'autres personnes à faire leur deuil ?

T : Effectivement, cet album est dédié à mon père, comme un condensé de ce que j'aurais voulu lui dire et que je n'ai jamais eu l'occasion de formuler, surtout sur le morceau « Adored » qui symbolise la (presque) fin de mon processus de deuil, à savoir l'acceptation.

Je suis tellement touché que cet album transpire l'émotion, c'était le but, partagé pour se retrouver autour de ces émotions et ne plus penser être seul dans la tempête. J'avais espoir que cela puisse être parlant pour les auditeurs et auditrices, c'est aussi pour cela que les lyrics sont accessibles via le bandcamp du groupe, afin de simplifier la compréhension.

Au niveau composition, j'avais à coeur de commencer à composer les harmonies de base, qui pourraient laisser la place nécessaire aux lyrics en toute cohérence avec leur sens propre. Quand je composais les premiers riffs de chaque morceau, j'avais immédiatement en tête les mots qui pourraient coller dessus, c'était très instinctif.

M : Musicalement, le choix de faire du post Metal à vif était évident depuis le début du projet ? On ressent de la froideur, mais aussi la fragilité tout au long du disque, est-ce pour montrer l'état d'esprit que l'on peut avoir en telles circonstances ?

Initialement, j'étais plutôt sur de la folk / dark folk, mais quand j'ai fait écouter les premiers morceaux, qui étaient très différents de ce qu'on peut écouter aujourd'hui, on s'est dit avec le batteur de l'époque qu'il fallait creuser encore plus et ajouter de la puissance à l'ensemble. J'ai effectivement souhaité garder cette froideur et cette sensibilité parce que c'est effectivement dans cet état que je me trouvais, incapable de communiquer sur ces sujets, tout en étant à fleur de peau pendant des années. Je ne pense pas être en mesure de dire : voilà comment on se sent, voilà comment il faut faire, loin de là , mais plutôt une transcription de ce que j'ai traversé et qui pourra peut-être aider quelqu'un. Pour revenir sur adored, c'est vraiment un regain d'énergie positive, sortir grandit de tout cela, un climax.

M : D'où vient le nom WNTRHLTR ? Comment et pourquoi l'avoir choisi ?

T : Le nom du groupe est d'abord en rapport avec le peintre Franz Xaver Winterhalter, d'origine bavaroise, qui d'un jour à l'autre se retrouve propulsé à la cour d'Angleterre en tant que peintre de la cour. Son existence fut tiraillée entre ses racines germaniques et son futur en tant qu'immigré anglais, compliqué de s'épanouir quand on n'est pas reconnu par ses contemporains et renié par ses connaissances passéesâ€¦ Cette question de dualité est omniprésente dans l'album, mais sur d'autres points. Cette histoire faisait sens pour moi, d'autant plus que ce peintre est un de mes ancêtres.

M : On a parlé de la musique, mais le message par les paroles est un tout finalement. Décrivez-nous votre processus d'écriture ? Votre façon de chanter est parfaitement adaptée, comment avez-vous trouvé votre voix ?

T : Je n'ai pas de processus d'écriture particulier, mais j'ai une note ouverte sur mon téléphone, que j'ouvre quand j'ai des émotions qui arrivent et que je développe plus tard.

J'ai entamé une psychanalyse il y a quelques années afin de comprendre certains points et souvent après une séance j'ai des mots qui viennent et que je note. Je ne dirais pas que c'est une routine ou processus d'écriture, mais cela me permet de noter des phrases qui viennent du cÅ“ur. J'écris d'abord en français pour être sur d'avoir les mots qui reflèteront au mieux mes émotions, puis je transpose en anglais afin de donner cette puissance verbale que l'on peut avoir avec un seul mot en anglais, mais plus compliqué en français, pour ma part en tout cas.

J'ai mis énormément de temps à réussir à sortir un son au chant, par timidité et peur de ne pas être légitime. C'est maintenant derrière moi et j'ai développé ma voix à l'aide de Kathrine Shepard (du groupe Sylvaine) et après, c'est simplement une expression de ce que j'avais au fond de moi. Il est beaucoup plus simple de s'exprimer quand on est sincère que maintenant, je ne pose plus de questions, cela vient tout seul.

M : Peut-on s'attendre à une suite ? Cet album a été fait dans un but tellement précisâ€¦ Vers quoi pourriez-vous partir pour un nouvel album ?

T : Bien sûr qu'il y aura une suite, elle est d'ailleurs déjà en préparation. Peut-être que le suivant n'aura pas le même but, c'est peut-être sur, mais j'ai encore pas mal de sujets internes à exploiter ! En revanche, je ne pense pas me recycler dans le bal-musetteâ€¦ Désolé !

M : Pour connaître les influences musicales de mes interlocuteurs, je pose souvent cette question : Pouvez-vous nous faire la liste des dix albums, de metal ou non, qui ont marqué votre vie ?

T : Mon premier album de métal : Soulfly - Soulfly, je suis tombé amoureux tout de suite, ça parle de racines, de rage aussi et à 11 ans, ça m'a de suite fasciné et marqué mon intérêt pour le metal.

2 : Envy - All the footprints you've ever left and the fear excpecting ahead

3 : Arno - Idiots savants

4 : Jean ferrat - Ferrat chante Aragon

5 : QOTSA - Song for the deaf

6 : Blue Oyster Cult - Spectres

7 : Chelsea Wolfe - Pain is Beauty

8 : Korn - Korn (le titre blind qui nous a tous rendu complètement fou !)

9 : Kickback - Forever war (et plus particulièrement le titre like the worms)

10 : Neil Young - Mirrorball (on l'écoutait dans la voiture avec ma mère quand je passais la conduite accompagnée, c'était le seul truc qu'elle acceptait, parce que Korn et Slpiknot la rendait tendue haha)

Et tellement d'autres albumsâ€¦

M : Un très grand merci pour cette interview pour Blastpheme webzine, je vous laisse le mot de la finâ€¦

Un grand merci à vous pour votre intérêt et les questions plus pertinentes les unes que les autres, j'ai pris plaisir à y répondre.

J'espère que l'album plaira et qu'il servira à d'autres dans cette situation qui résulte de la vie, finalement.

N'hésitez pas à nous écrire pour partager vos émotions, vos ressenti, la porte est ouverte !