S'il y a une chose qu'il faut retenir de la décennie 2010-2020, puisque tout le monde n'a que cette décennie à la bouche, c'est qu'elle a marqué le retour à plus d'un titre des néons dans l'imaginaire science-fiction populaire.
Pensez-y, il aura fallu attendre cette décennie pour avoir une adaptation filmique de Ghost in the Shell et Gunnm, une suite à Tron et Blade Runner. Même en dehors de la science-fiction, c'est au cours de ces dix ans que Nicolas Winding Refn a sorti ses chefs d'oeuvres Drive, Only God Forgives et The Neon Demon, Gaspar Noé a sorti Enter the Void. Vous l'aurez compris, niveau cinéma, ça a carburé à la lumière blafarde. Musicalement ça s'est ressenti aussi, avec entre autre la montée sur ces dix ans du style Djent, très orienté lui-même vers la science-fiction, et les couleurs fortes, artificielles. On allait aussi voir débarquer le Aliencore, cette espèce de mouvance entre Metalcore et Death Technique dont Rings of Saturn sont les fers de lance. Et pour finir, les années 2010 voyaient s'élever dans les hautes strates de la popularité la Synthwave, qui aura su séduire à plus d'un titre les auditeurs d'Electro comme ceux du Metal, notamment grâce à Carpenter Brut, Dance with the Dead, Perturbator et pourquoi pas Craven, qui ont rendu la frontière fine. Le plus fou dans tout ça restant que toute cette innovation, car c'est de ça qu'il est question est quasiment à chaque fois né d'une certaine forme de nostalgie, qui se joue à plusieurs niveau. Si l'on a du mal à voir le côté nostalgique dans le Djent par exemple, il faut se rappeler cependant que le style marque le retour des Guitar Heroes qui avaient disparus des écrans radars pendant les années 90 et qui peinaient à faire leurs places dans les années 2000. Tous les Tosin Abasi, Sarah Longfield, Misha Mansoor, Joel Omans, ou Jason Richardson, sont autant d'exemples. Quant au côté Synthwave, la nostalgie ne nécessite pas tant d'explicitation, tant c'est le leitmotiv du style dans son essence.
Et avec tout ça vous vous demandez où je veux en venir, parce que le groupe du jour n'est pas un groupe de Djent, ou de Synthwave. Ce que je veux vous dire, c'est que la nostalgie exaltée a peuplé la décennie maintenant échue, et qu'Angel Sword, groupe de Heavy Metal Finlandais dont on va traiter aujourd'hui le second album, Neon City (là , tout s'explique), n'est pas en reste dans cette déclaration d'amour rétro-futuriste. On le voit en lisant le titre bien-sûr, mais on le voit également avant même les premières notes par cette cover qui ferait la fierté de Paul Verhoeven. Le groupe plante le décor, nous voilà perdu dans un univers urbain entre Blade Runner, Robocop et Judge Dredd, pour un bon gros shoot de gros son à l'ancienne.
Et musicalement ça dit quoi ? Là où c'est fou, c'est qu'on dirait bien qu'Angel Sword nous vient tout droit des années 80. On retrouve ce souffle dans la production, ce grain dans le son des guitares, ce crachouillis des cymbales. Et on était en 2019. Les temps sont confondus.
D'autant que les compositions sentent bon la maîtrise: c'est très mélodique, on a envie de chanter de bout en bout, ça contient juste ce qu'il faut de technique sans être exhibitionniste.
Mention spéciale notamment au morceau "Nightrider" qui est une espèce de power ballad magistrale où il y a tout, vraiment tout. Entre une guitare très efficace avec des riffs magnifiques, une basse bien ronde et ultra efficace dans les transition, ainsi que pour finir une batterie bien enracinée dans la structure, qui ne fait aucune prouesse mais qui est toujours là où il faut être.
J'ai oublié le chant ? Quel distrait je suis! Vous aimez Lordi ? Il y a un peu de ça dans Angel Sword. C'est une voix rauque, avec un gros grain dans le fond de la gorge, qui donne un côté bourru mais n'empêche pas une certaine finesse presque douce dans la mélodie. Mes aïeux, c'est bien fait!
La dernière chose que je tiens à souligner, c'est que vraiment l'album respire, grâce au talent d'écriture. L'énergie est bien là mais c'est un album reposant et ressourçant. En temps voulu on a du gros riff et de la vitesse, mais les baffes ne sont pas éternelles, et les ralentissements sont de vrais bouffées d'airs, à fleur de peau, délicates.
Encore une belle trouvaille pour un style qui une fois de plus n'a pas dit son dernier mot grâce à la passion des artistes!