Crustpunk
Doom
Emo
Posthardcore
Parfois, il arrive que la créativité de certains individus semble sans limite. Ces artistes semblent hyperactifs et intarissables, multipliant les projets, les concepts avec plus ou (rarement) moins de brio.
C’est la perception que j’ai de gens comme Devin Townsend (Strapping Young Lad, Devin Townsend Project, Ziltoid etc…) ou Tuomas Saukkonen (Before The Dawn, Black Sun Aeon, Wolfheart, Routasielu, Dawn of Solace…) pour ne citer qu’eux.
Alex “CF” Bradshaw correspond certainement à cette description. Illustrateur, romancier et musicien britannique, son CV parle de lui même :
Fall of Efrafa, Archivist, Light Bearer, Anophelli, Carnist, Eleleth, Urksek, Dinomania, Momentum et… Morrow, qui nous intéresse aujourd’hui.
Morrow, comme plusieurs autres projets d’Alex, prend (à ce jour) la forme d’une trilogie d’albums concept formant chacun un volume d’un univers cohérent et qui dispose de caractéristiques sonores uniques en accord avec le récit.
L’album qui nous intéresse aujourd’hui est “The Quiet Earth”, offrande parue en 2022 et qui semble être la troisième (et peut-être ultime) pièce du projet.
Morrow est pour cet album composé d’un line-up de 8 musiciens (un batteur, un bassiste, deux guitaristes, un vocaliste principal, un violoniste et une violoncelliste), un lineup déjà conséquent et inhabituel pour le style auquel il faut rajouter une liste de guests XXL (15 voix) et 5 étoiles : Anna (Archivist et Anopheli), Gerfried Ambrosch (Momentum et Light Bearer), Oskar Karlsson (Icos et Monachus), Natalie (Wildspeaker), Ian Makau (Daydream, The Wakai), Carl Auge (du fabuleux groupe His Hero is Gone) pour ne citer qu’elleux.
Si on ajoute que l’album est composé de 6 titres pour une durée de 43 minutes ( dont la moitié est constituée de 2 morceaux dépassant 10 minutes), on obtient un ensemble que l’on peut qualifier de démesuré, d’autant plus qu’on parle d’un projet qui se situe à la lisière des contrées emo, crust punk et punk hardcore !
Musicalement l’album est d’une richesse rare : usage des cordes frottées, de signatures rythmiques qui s’aventurent hors du 4/4, d’intros acoustiques, des passages D-Beat et Neo-Crust “traditionnels” autant que des ralentissements Doom voire Sludge.
L'artwork réalisé par Alex CF
Morrow nous envoie tout sans compromis et dans une cohérence globale qui force le respect, l’enchaînement des multiples voix qui interviennent sur l’album saisit l’auditeur dès le build-up introductif de “Rejoice This Quiet Earth” et nous plonge à nouveau dans les récits des Norrs issus de l’imaginaire de l’inévitable Alex, dont la qualité d’écriture n’est plus à prouver et qui se démontre à nouveau dans les lyrics de cet opus.
L’ensemble des titres s’enchaîne avec fluidité et même les plus gros morceaux comme “Totemic” (13 min 16 au compteur) s’avalent sans difficulté, l’alternance de tempos rapides et lents, de passages mélodiques voire ambiants avec l’usage des cordes frottées permettant certainement de rendre plus digeste l’ensemble. Le milieu de l’album nous offre quelques enchaînements et passages savoureux (le tiers Doom et le build up de “To The Fold” avec ses violons et la rage des multiples voix qui s’enchaînent, le ralentissement de tempo dans la seconde moitié de “Fugue Plague” de très bon goût) puis son dernier tiers se compose de l’interlude acoustique et spoken word “Our Right in Rest” et du final “Of Sermons and Omens to Mend” . Celui ci s’ouvre sur une récitation hurlée d’un passage de “Rime of The Ancient Mariner” avant l’arrivée d’un enchaînement de passages qui nous offre tout ce que Morrow cherche à nous proposer sur 10 minutes : la rythmique doom, le d-beat et les rythmiques neocrust, les voix qui s’enchaînent, se superposent, les leads au violon, les breaks, l’émotion… Puis la fermeture sur quelques notes de violon en soliste.
The Quiet Earth est un album ambitieux mais qui livre réellement tout ce qu’il promet. Il s’inscrit dans une galaxie de projets néo-crust anglais qui lorgnent sur le doom, le post et l’emo avec des caractéristiques “prog-isantes” dans la démarche . Alex “CF” Bradshaw semble occuper une place centrale dans cet univers, et ça ne semble pas prêt de s’arrêter, ce qui n’est pas pour nous déplaire tant la proposition du bougre est bien ficelée et depuis tant d’années (Fall of Efrafa et Light Bearer en tête). Morrow est peut-être arrivé à son terme avec The Quiet Earth, et il n’y avait probablement pas de meilleure conclusion possible.
Le bandcamp de Morrow :
Le bandcamp de Morrow :
https://morrowpunx.bandcamp.com/
Le site d'Alex CF en tant qu'auteur/illustrateur :