Avec bien des exemples pour appuyer mon propos, on peut dire que certains pays ont eu le chic pour voler la vedette à la Norvège en termes de Black Metal. Car si c'est bien dans les neiges du grand nord que la seconde vague s'est épanouie, on ne peut pas dire que celle-ci se renouvelle tellement, à l'exception de quelques jeunes formations prometteuses mais confidentielles comme Mork Materie (dont je vous conseille l'excellent album Belial) par exemple.
Pendant ce temps, le style vit des essors incroyables en France, dans les pays de l'Est Européen, mais aussi, surtout, dans le cas qui nous intéresse ce jour, en Grèce. Sur ces dernières années, le pays n'a eu de cesse de nous alimenter en pépites du genre, entre les mythiques Necromantia et leurs basses huit cordes, les premières galettes endiablées de Septicflesh, les sombres murmures de Legions of Doom ou Astarte, et surtout l'ascension fulgurante et ininterrompue du Rotting Christ ; pas de doute, il y a de quoi se lécher les babines rien que sur la partie visible de l'iceberg. Et si pour le coup nous nous aventurions dans des méandres plus undergrounds ?
Car dans la tourmente sans fin de l'année 2020, un groupe est sorti de l'ombre pour faire raisonner jusque chez les dieux de l'Olympe son amour pour l'Hadès : Yoth Iria.
Et là je sens que très vite vous allez protester : c'est des vieux chez Yoth Iria. Les deux membres crédités du combo ont tous déjà eu un pied sur les vieilles pierres de Rotting Christ et Necromantia, ou encore Varathron. Hé oui mais calme-toi donc lecteur furibond, on parlera de Yovel, Dephosphorus et Nox Formulae une autre fois ! En attendant, c'est un projet tout neuf, qui, contre toute attente, sonne tout neuf.
Parfois, à l'écoute de certains vieux papes de certaines scènes Metal, on a l'impression qu'en vingt ou trente ans, ils n'ont rien écouté d'autre que leur propre musique, et n'ont jamais cherché à s'abreuver d'autres choses. Pensez-y, on a dû attendre Archangel de Soulfly pour que Max Cavalera s'aventure sur des sentiers inconnus. C'est aussi un peu le problème de Sale Freux, qui a sorti quelques très bons albums (Adieu Vat et Vindilis en tête), mais a depuis un peu de mal à sortir de sa zone de confort. Ce qui apparaît très vite à l'écoute de ce premier EP de Yoth Iria, c'est qu'au contraire, les deux sieurs, fort de leur expérience très riche au sein de nombreuses formations, ont su rester à la page, et se sont imprégné des bonnes choses. Under His Sway est bien fait, et bien trop court !
Et tout commence par une ambiance léchée : le titre éponyme ouvre le bal avec une petite valse macabre au clavier, du meilleur effet, qui nous place directement dans une ambiance infernale. Alors la ronde maudite commencent, vient la disto, viennent les blasts, et là on arrive sur quelque chose de complètement épique, à la limite du Death Mélodique, avec du chant grégorien pour ponctuer les effusions de notes. On est projetés au coeur d'un rituel frénétique d'invocation, qui nous laisse entrevoir l'immensité cyclopéenne du pandémonium. Yoth Iria prend le partie de proposer un Black Metal ultra-fédérateur, pugnace, qui supporterait une fosse à pogo. Et alors que la tension est bien haute, on nous met en plein milieu des petits passages mélodiques plus léger, et des solos qui font presque penser à du vieux Heavy. On note également quelques passages bien lourds et bien graves presque Doom, qui côtoient sur le même morceau des passages bien Punks en power chords et des harmonies à la tierce de Power Metal. Chaque chanson est riche, et complexe. Instrumentalement, c'est du pur bonheur, qui donne envie de retrouver ça sur scène au plus vite. La voix en revanche est relativement linéaire, mais le tout étant servi avec une production soignée, et des effets d'ambiance bien choisi, l'harmonie n'est pas perturbée.
J'espère vraiment que ce projet va se maintenir et prendre le temps de sortir un album (bientôt semble-t-il, intitulé As The Flame Withers), ou deux, ou quinze, parce que ce démarrage laisse présager du meilleur, et je réitère : je n'hésiterais pas une seule seconde à courir les voir sur scène. Bien préparé, ce pourrait être une expérience mémorable !
Bonne écoute !