LIVE REPORT : In Theatrum Denonium - Denain - 05/03/2022

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Verveneyel

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1 août 2023

" Live Report du In Theatrum Denonium 2022, par Verveneyel (texte) et Evil Ted (photo) "
Chers amis, ce samedi 5 mars, j'ai vécu un voyage dans le temps digne de Tony Scott et Robert Zemeckis.
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Voyez-vous, en 2020 quand nous étions frappés par le confinement, le dernier concert auquel j'ai pu assister avant que tout ferme, c'était le In Theatrum Denonium de Denain. Soirée mémorable s'il en est, où je retiens pêle-mêle l'extase de Saor, les frissons gothiques de Carach Angren, la lourdeur ritualiste de Sulphur Aeon, la transe de Borgne, sans oublier la méditation de Spectrale. C'est un festival comme il s'en fait peu, qui sait offrir à  un lieu d'exception (le splendide Théâtre municipal de Denain) la musique sombre qu'il mérite. Et puis plus rien. Pendant des mois, plus de performance, tout le monde chez soi.
Après de si fortes impressions, j'attendais avec impatience le retour de ce festival. Et mes attentes n'ont pas été trahies.
Cette année encore, l'équipe de Nord Forge s'était donnée du mal pour que la qualité soit au rendez-vous. On retrouvait à  l'affiche Path of Memory, excellent projet de Darkwave Suisse avec notamment du personnel de chez Borgne ; Aluk Todolo et leur Doom occulte instrumental teinté de Drone et de Free Jazz, les géants français de Seth venus défendre leur chef d'oeuvre sorti en 2021 "La Morsure du Christ" ; suivis de Bolzer et des légendes norvégiennes de Taake.
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Au dernier moment, Bolzer se fait porter pâle, le batteur cloué au lit par des symptômes virulents. Qu'à  cela ne tienne, l'association ne se démonte pas, après avoir essuyé l'annulation de Carpathian Forest à  la précédente édition. C'est le combo Nordiste ultra-violent de Hats Barn qui prend le relai.
Avec des machines de guerre pareilles, l'édition partait déjà  avec beaucoup de promesses.
Dans les faits, les concerts étaient tous franchement excellents. L'absence de Bolzer a permit à  Seth de remonter sur l'affiche, ce qui à  mon sens les a mieux mis en valeur ; et les performances se sont montrées tout à  fait cohérentes les unes après les autres.
C'est Path of Memory qui a ouvert le bal dans le fumoir du Théâtre, avec encens et bougies, pour mettre en jambe les festivaliers. Le ton était donné avec beaucoup de beauté et de finesse ; le tout dans un réel esprit de proximité avec le public. Le groupe a joué sa musique au milieu du monde comme une performance de rue. À noter que le groupe a rejoué plusieurs fois, entre les concerts, occasionnant même des passages plus Black Metal que prévus, et parfois dans l'obscurité. Tout au long de la soirée le groupe aura fourni un superbe effort.
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Les portes de l'enceinte principale s'ouvrent, et il est temps d'accueillir la lourdeur lancinante et envoutante d'Aluk Todolo. La performance était intense, pas forcément au goût des oreilles les moins initiées, mais révélatrice du haut niveau des musiciens. La torpeur accentuée par des jeux de projections et de lumières, le groupe bombarde les oreilles de ses bourdonnements épais, et on se sent saisi par les volutes de l'opium sonore. Cette performance sera venu conclure la partie la plus méditative de la soirée.
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Arrivent Hats Barn, et si les musiciens n'ont pas pu pousser le jeu de scène aussi loin qu'il le font d'habitude dans la violence et le sang, force est de constaté qu'ils ont été le groupe le plus extrême musicalement du festival, et qu'ils ont été scéniquement impitoyable, notamment le chanteur principal dont les maquillages et gestes rappellent pour beaucoup les frasques d'Attila Csihar ; mais aussi le guitariste dont la stature et l'habillement lui donnaient des airs de creuseur de caveau.
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C'est après qu'arrive pour moi le clou du spectacle, tout en sachant que je suis un peu biaisé : pour moi, Seth est un des plus grands groupes de Black Metal français, à  côté de qui beaucoup de groupes dont on cultive davantage le mythe font en réalité pâle figure. Montant sur scène en conquérant, la bande d'Heimoth a donné un concert de très haute volée, épique et fédérateur, avec un Saint Vincent maître de son audience. Ce concert m'aura laissé le souffle court, et il faut dire qu'il était définitivement taillé pour le lieu.
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On arrive enfin à  notre tête d'affiche, et pour tout vous dire, Taake était la Rock Star de cette soirée. C'est un peu comme finir une journée de Hellfest avec Kiss, version "viens ici que je te crame ton église". La rigueur clinique du batteur et du guitariste rythmique n'auront pas empêché le bassiste, le soliste, mais surtout le chanteur, de mettre le feu à  Denain avec un concert bien barge et Rock'N'Roll. Le matos n'a pas toujours apprécié, surtout quand Hoest détruit littéralement un micro sur la structure d'un retour (RIP), le public en a un peu pris pour son grade ("French assholes", "humble village"), mais il se dégageait de tout ça un petit quelque chose de Punk, pas forcément effrayant, mais amusant.
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Et quand je vous disais que j'avais fait un voyage dans le temps, j'y reviens : j'ai passé au In Theatrum Denonium une soirée particulièrement agréable aussi parce qu'elle avait quelque chose de surréaliste. Une fois le pass sanitaire contrôlé, les masques tombent, et j'ai recroisé ce soir là  tout un tas de têtes familières, que j'avais croisé ce même soir avant la fermeture, des gens que concrètement je n'avais pas revu depuis deux ans, festivaliers, bénévoles, exposants... Revoir cette communauté, ces amis, ces connaissances, ces visages, en ce lieu, ça avait quelque chose de magique.
Merci NordForge.