En voici un sujet qui peut prêter à discussion. Comment les enfants perçoivent-ils et réagissent-ils face au metal ? Beaucoup pensent que cette musique lourde, véloce, parfois violente ne soit pas vraiment indiquée dans un processus de développement calme, sain et serein. Dans cet article je ne traiterai pas des groupes destinés à un public (très) jeune (Bernard Minet Metal Band, Henry Dès, Hevisaurus, Babymetal ou encore Aldebert qui s'est essayé au metal dans le bien nommé « le concert de metal » ; ni de merchandising notamment vestimentaire qui investit les rayons pour enfants ; ni de gimmicks lors de concerts metal (Ozzy Osbourne , Steel Panther ou Mass Hysteria font souvent monter des kids sur scène) ; ou encore d'émissions de téléréalité où les enfants sont mis en scène (la jeune drummeuse qui reprend du System Of A Down https://www.youtube.com/watch?v=iaDmqQKftVA ). J'aborderai ce thème plutôt sous un angle scientifique/sociologique en montrant la place que peut avoir le metal dans le développement de l'enfant, de son plus jeune âge jusqu'au tout début de son adolescence (où il est libre du choix ou du non-choix de ses propres apprentissages).
LA MAIN-STAGE SUR LE BERCEAU
On va s'intéresser tout d'abord à la maternité, et à l'influence que pourrait avoir la musique (le plus ancien mode de communication), et donc le metal, sur la grossesse et l'enfant à naître. Si l'impact de la voix des parents et des sons internes au corps de la mère (rythmes cardiaques et sanguins…) n'ont plus à être prouvés scientifiquement, on sait aujourd'hui que le futur nouveau-né réagi également à la musique. Des études, notamment une menée à Helsinki en 2013 et une autre menée à Barcelone en 2018, ont caractérisé des interactions entre le fÅ“tus et la musique.
Les Finlandais ont prouvé que la musique stimule l'activité cérébrale des fÅ“tus, accentue le développement du cerveau, et ainsi augmenterait par voie de conséquences la mémoire et les facultés d'apprentissage. Cette exposition devant été précautionneuse : la musique ne devant pas présenter des niveaux sonores trop élevées.
Les espagnols ont montré, quant à eux, que l'embryon percevait la vibration des sons en utilisant un Babypod (hautparleur placé dans le vagin de la mère) diffusant de la musique à basses fréquences pour caractériser ces interactions. Ainsi ils ont pu démontrer grâce aux mouvements de la bouche et de la langue que ces sons stimulaient le fÅ“tus (l'étude portait sur des fÅ“tus entre 18 et 38 semaines de grossesse) . Cet institut espagnol a également conclu avoir amélioré le taux de fécondation in vitro en diffusant ces vibrations musicales dans les incubateurs pour la reproduction assistée.
Les scientifiques privilégient alors l'écoute de musiques à basses fréquences, peu rythmées, car reconnues comme apaisantes. Ce qui se vérifié également chez les nouveau-nés et les très jeunes enfants. Comment faire alors pour faire écouter du metal ou des choses qui s'en rapprocheraient ? Rien de plus simple : la collection « ROCKABYE BABY ! » propose des disques aux allures de best-of regroupant les classiques du rock/metal réadaptées en berceuses instrumentales. On retrouve notamment Guns N'Roses (Estranged - https://www.youtube.com/watch?v=XYMMLA77-bE ), Iron Maiden (Aces High - https://www.youtube.com/watch?v=-3h7IblXMi0 ), Kiss ( Love Gun - https://www.youtube.com/results?search_query=rockabye+baby+kiss ), AC/DC ( Back in black - https://www.youtube.com/watch?v=c1BA6TZt3ME ), ou encore Metallica (Enter Sandman - https://www.youtube.com/watch?v=nV16UCnoMT8 ). On peut donc commencer son apprentissage metal, en sécurité, dans le berceau ou même un peu avant.
THERAPY ?
Le metal continue à jouir d'une mauvaise réputation en France, et ce malgré le fait que le Hellfest soit devenu « the place to be » en juin pour les metalleux et les non-metalleux. Les fans de metal sont certes mieux tolérés (le metalleux est un consommateur à « bichonner » comme un autre ^^) mais encore véritablement pris au sérieux (rappelez-vous l'émission Quotidien lors de la venue de Tobias Forge - Ghost…une parodie d'interview pour l'un des phénomènes mondial metal de ces dernières années). Vous n'avez sans doute pas non plus oublié que les américains diffusaient du metal lors de séances de torture pratiquées à Guantanamo.
Fort heureusement des voix contraires commencent à s'élever et à défendre l'étendard metal bien souvent écorné par les bien-pensants. Une étude de l'université australienne de Macquarie a récemment démontré, en 2019, que la violence n'est pas banalisée pour les amateurs de death metal et que ces auditeurs ne sont pas plus violents que les autres. Les stéréotypes ont pourtant la vie dure et vous pouvez aussi me rétorquer que l'Australie c'est le pays du pub-rock et d'AC/DC, que la France n'est pas rock-metal, et que cette étude concerne des jeunes adultes et adultes (et pas des enfants).
Pourtant la France n'est pas à la traine, je pense notamment à Laurent Karila (psychiatre, spécialiste en addictologie) et ses collaborations avec Renaud Hantson sur les albums « Addictions » et « Psychiatric ». Mais quelle ne fut pas ma surprise d'apprendre qu'une thérapeute, Florence Beuken, avait également eu recours au metal pour soigner des enfants en France. La musicothérapie est une médecine douce qui utilise les bienfaits de la musique dans une démarche de soin. Elle est également utilisée chez les personnes diagnostiquées comme autistes (très sensibles aux stimuli musicaux) afin de d'établir/rétablir une communication, de diminuer leurs troubles de comportement en agissant sur l'attention et la concentration (petite parenthèse : ce n'est donc pas surprenant que l'on traite également la maladie d'Alzheimer chez nos ainés avec la musicothérapie afin d'éviter le déclin/de maintenir leurs capacités mémorielles).
Pour en revenir à la thérapeute Lyonnaise, celle-ci est venue au metal de manière totalement fortuite. La musique du groupe français « We All Die (Laughing) », qui comprend notamment Arno Strobl dans ses rangs, a permis à la spécialiste d'avancer dans le traitement d'un enfant de 9 ans diagnostiqué à tort comme « hyperactif » durant les séances de musicothérapie. Ainsi ce dernier a pu exprimer ses conflits intérieurs et ainsi redémarrer un processus développement personnel plus vertueux chez l'enfant. Le metal, et ce même sous sa forme la plus brutale, peut être une échappatoire, un moyen d'extérioriser et de se libérer de certaines tensions/pulsions (une catharsis, un peu comme les jeux-vidéos qui eux aussi alimentent de très nombreux débats) . D'ailleurs, ne dit-on pas, et ce depuis la Grèce antique, que «la musique adoucit les mÅ“urs » (Aristote).
Pour conclure cet article, il est logique de laisser la parole aux enfants afin qu'ils partagent leurs expériences avec notre musique favorite.
SCHOOL OF ROCK
Cet attrait personnel des enfants pour le metal se retrouve dans les fameuses vidéos « Kids react… » dans lesquelles nos chérubins, un casque fixé sur leurs oreilles, vont découvrir des groupes tels que Metallica, AC/DC, Mà¶tley Crà¼e, System Of A Down etc … Prenons la vidéo consacrée aux légendes Iron Maiden, le groupe qui représente au mieux le metal dans l'inconscient collectif. Les 6 première secondes nous offrent un panel assez représentatif de ce que l'on était en droit de s'attendre : un enfant fait du Air-Guitar (qui pourtant dira ne pas aimer le groupe par la suite), une autre dit qu'ils « se mettent à crier en plein milieu » et une autre dit, à la vue des pochettes du groupe qu'elle va en « faire des cauchemars » (lien : https://www.youtube.com/watch?v=UiYpDdsK4BU ).
Pourtant, plus la vidéo avance (elle dure 10 minutes et les titres s'enchainent) plus les réactions des enfants sont variées et réfléchies (ils comprennent la thématique sur « The Trooper »). Et même s'ils n'accrochent pas à tous les morceaux présentés, voire même s'ils n'aiment pas du tout (c'est trop rapide, « too heavy metal » ou encore « very loud »), ils se montrent très attentifs aux changements de rythmes, d'ambiances, au ressenti des guitares et du chant, avec parfois un certain pragmatisme parfois étonnant. En effet, sur « Fear Of The Dark », un enfant déclare « s'il a peur du noir pourquoi ne prend-il pas une torche ou un truc du genre », une autre considère que « ça ferait une bonne chanson d'Halloween ». A la vue des pochettes une jeune fille analyse très justement que « le nom du groupe est morbide, qu'il y a du morbide dans les chansons et que le tout colle bien ».
On constate donc qu'ils sont finalement très ouverts, qu'ils sont capables de dire pourquoi ils aiment et pourquoi ils n'aiment pas de manière constructive et réfléchi (à leur niveau certes, mais j'ai été agréablement surpris par certains propos tenus). Ce qui n'était pas gagné d'avance face à un courant musical réputé pour être clivant et difficile d'accès…pour de très nombreux adultes en fin de compte. Car comme l'a si bien dit Christiane Singer : « qui peut mieux qu'un enfant nous arracher à toutes nos amarres ? ».
Je vous invite à suivre nos différents supports médias car Verveneyel vous proposera très prochainement un article sur le Metal pour enfant.
Stay tuned.