INTERVIEW - Velfragor

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Verveneyel

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1 août 2023

" Voilà  une première pour le zine. C'est la première fois qu'on interview le cerveau d'un projet solo ! Aujourd'hui je vous propose de découvrir l'univers de Velfragor, personnage haut en couleur, qui nous parlera de ses aventures et déboires d'artiste Mexicain en France. "
Avant propos : Voilà  une première pour le zine. C'est la première fois qu'on interview le cerveau d'un projet solo ! Aujourd'hui je vous propose de découvrir l'univers de Velfragor, personnage haut en couleur, qui nous parlera de ses aventures et déboires d'artiste Mexicain en France. Bonne lecture, Verveneyel
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SALUT ! COMMENT à‡A VA ?
Salut ! En ce moment c'est un peu compliqué, toutes mes activités sont interrompues, toutes les choses extérieures sont interdites... Je viens de sortir mon premier single pour le prochain album. Ce sera un album à  treize titres en édition normale, et seize en édition spéciale ; édition spéciale qui d'ailleurs sera livrée avec un Ouija illustré spécialement par moi. Justement, je prépare le prochain single, que je voulais sortir fin novembre, et ça ne sera pas possible car pour le moment je ne peux pas filmer les nouvelles vidéos, j'ai besoin de prises de vues extérieures.
TES SORTIES SONT TOUJOURS ASSEZ IMPORTANTES EN TERMES DE TAILLE, JE PENSE NOTAMMENT A L'ALBUM LE CHANT DE DANTES QUI A ENORMEMENT DE TITRES. J'IMAGINE QUE à‡A DOIT DEMANDER DE GROS INVESTISSEMENTS.
Oui, exactement. Je suis seul à  porter ce projet en plus, donc tout l'investissement vient de ma poche.
COMMENT FAIS-TU POUR SORTIR AUTANT DE CHOSES EN SI PEU DE TEMPS ?
Tu as vu Le Chant de Dantès, l'album de Black Metal symphonique que j'ai sorti sur le Comte de Monte Cristo. Cet album en fait était composé depuis plusieurs années, mais pour des raisons personnelles je suis resté éloigné de la musique, et c'est depuis 2018 que je m'y suis mis à  récupérer ma vie artistique complètement. En parallèle de ce projet, je fais un projet de Rock érotique qu'il s'appelle The Sins of Skin. Rien à  voir avec le Metal. C'est un album sur les femmes, avec des poèmes érotiques pour accompagner la musique. à‡a surfe un peu sur la nouvelle tendance qu'a initié "50 Shades of Grey", les nouveaux romans et films érotiques.
ET LA ENCORE TU ES TOUT SEUL ?
Je suis tout seul sur ce projet aussi. Et du coup, l'album est fini, les visuels aussi, maintenant je cherche des sponsors, pour avoir un peu de moyens. En tant que Mexicain en France, pour moi c'est un peu difficile de savoir comment les choses marchent au niveau administratif. La France donne beaucoup d'aides aux artistes, mais pour trouver les bonnes informations, les bonnes personnes, ça prend beaucoup de temps.
COMMENT T'ES-TU RETROUVE EN FRANCE, ET POURQUOI AS-TU VOULU ECRIRE EN FRANà‡AIS ?
Depuis que je suis enfant je suis attiré par la France. Le premier livre que j'ai lu, de mémoire, c'était Le Comte de Monte Cristo, en version espagnole bien-sûre. Je suis arrivé en 2007, initialement comme touriste, parce qu'on mon plan de base avait toujours été de connaître la France, connaître la littérature, l'art, l'histoire de France. D'autre part, ma famille, au 19ème siècle, était venue de France au Mexique pendant l'invasion Française. Les échanges entre la France et le Mexique allaient bon train à  l'époque, et toutes les entreprises de textile se sont installées à  ce moment là , ainsi que des pâtisseries. Et par exemple, la musique traditionnelle Ranchera est une sorte de parodie des grands bals à  la française, tout comme les costumes d'ailleurs, qui sont devenus traditionnels.
C'ETAIT DONC AUSSI UNE FAà‡ON DE REVENIR SUR TON HERITAGE FAMILIAL...
Exactement. Et comme je te disais j'ai aussi toujours été inspiré par Baudelaire, Victor Hugo... Ce sont des choses que je lisais étant enfant et qui me touchaient énormément. Et quand j'ai eu l'opportunité de visiter la France, c'est là  que m'est venue l'idée de faire un opéra Metal : Le Chant de Dantès. C'est pour ça que j'ai visité tous les endroits dont parle le livre : Marseille, Paris, la Catalogne, le château d'If. Tout cela pour m'inspirer, pour composer ce projet.
DE QUOI PARLENT TES NOUVELLES PRODUCTIONS ?
J'essaye toujours de faire des albums concepts. "Filius Prodigo" fait partie d'un concept qui sera une histoire apocryphe sur Lilith. Dans cette légende, Lilith est la femme d'Adam, mais Dieu lui-même tombe amoureux d'elle, en voulant à  tout prix la posséder. Mais finalement, Lilith tombe amoureuse de Lucifer, et c'est là  que commence le "défi".
TU REVIENS A QUELQUE CHOSE DE PLUS BIBLIQUE DONC ?
Oui, ça fait un moment que je cherche plutôt du côté biblique, et des textes apocryphes justement.
EST-CE QUE à‡A FAIT PARTIE DE TA SPIRITUALITE ? ES-TU SATANISTE ? OU CHRETIEN ?
Mes projets parlent effectivement de spiritualité, mais je ne crois pas, ni en dieu, ni en Satan. Mais j'utilise cette imagerie comme métaphore, pour amener des éléments critiques. C'est un peu ce que faisait John Milton avec le Paradis Perdu. C'était une critique indirecte de la monarchie. Pour éviter de se mettre en danger, il déguisait sa critique dans la poésie du Paradis Perdu. Je fais un peu la même chose avec "Filius Prodigo".
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ON L'A DIT, TU FAIS DE LA MUSIQUE SEUL, MAIS DE FAIT, AS-TU DEJA PENSE A LA JOUER SUR SCENE ?
Je veux le faire, trouver des musiciens, etc. Mais alors même que je commence à  trouver ma place en France, c'est assez difficile. De mon point de vue, rentrer dans l'ambiance Metal en France, c'est compliqué, parce qu'il faut le réseau. Il faut que tu connaisses quelqu'un qui connait quelqu'un... Le fait que je ne sois pas spécialement connu, et que je ne joue pas, ça me ferme quelques portes.
D'AUTANT QUE TES MORCEAUX RISQUENT DE DEMANDER UN CERTAIN NOMBRE DE MUSICIENS POUR BIEN RESSORTIR EN LIVE.
Bon, ça, sur le plan technique, ça peut se faire grâce à  la technologie. Mais l'idée reste de trouver d'avoir les musiciens au niveau, d'avoir le temps...
POUR L'INSTANT QUELS SONT LES RETOURS QUE TU AS SUR TA MUSIQUE ?
À vrai dire, j'ai vraiment commencé à  avoir des retours à  partir du moment où j'ai sortie ma première vidéo, que j'ai aussi tourné totalement seul. C'est moi qui filme et qui monte tout. Et justement je suis content, parce qu'en quinze je jours, j'ai déjà  dépassé mille vues. C'est plutôt bien je trouve. Les critiques étaient bonnes aussi, en Amérique latine, au Japon, aux USA, en Russie.
POUR LE CLIP IL FALLAIT DONC A CHAQUE FOIS QUE TU REGLES LA CAMERA, PUIS QUE TU TE METTES EN FACE, ETC.
Oui, exactement. Le maquillage, le storyboard... Tout. Je comprends que pour les gens ce soit un peu fatiguant de me voir toujours au premier plan, mais je ne peux pas faire autrement.
ET LA ENCORE C'EST TOI QUI A DECIDE DE LE FAIRE SANS AIDE ?
Je n'avais pas la chance de connaître des gens pour m'aider, et je me disais qu'il fallait le faire quand même. J'ai toujours travaillé de façon indépendante. Je suis peintre, je fais de la bande-dessinée, et j'ai aussi étudié le cinéma, donc d'une certaine manière, ça m'aide beaucoup à  savoir comment faire. Le reste, j'ai appris en route.
TU T'ES DONC AUSSI OCCUPE DES VISUELS DE TES ALBUMS...
Oui. Tout ce que tu peux voir, c'est de moi. à‡a peut sembler égocentrique mais je ne trouve pas d'aide, donc il faut le faire. Par contre, pour "Filius Prodigo", je suis aidé par un producteur, en échange de quoi je fais le visuel pour son disque. Il m'aide à  masteriser l'album. J'ai aussi trouvé des musiciens pour participer, mais ils viennent de différents pays. Il y a une chanteuse Argentine, un chanteur Espagnol, et un autre chanteur Mexicain.
ON VA DONC AVOIR UNE ESPECE DE SUPER-PROJET INTERNATIONAL.
C'est ça, un peu comme Ayreon.
COMMENT à‡A S'EST FAIT ?
Le co-producteur, Salvador Holbox, j'avais déjà  travaillé avec lui pour Le Chant de Dantès. Je voulais faire ce projet avec beaucoup d'artistes, et en l'occurrence j'avais reçu l'aide de beaucoup de musiciens Mexicains, et d'une chanteuse Française, Julie Roxanne. C'était une chanteuse d'opéra professionnelle. On s'est connus sur les réseaux, on a parlé, je l'ai invitée. De la même façon, tous les solos de guitares sont faits par un musicien Mexicain très talentueux, Martin Martinez, qui joue dans une groupe de Black Metal écrivant dans la langue originelle des Aztèques, le nahuatl. Ce groupe s'appelle Xipe Totec.
TU DISAIS FAIRE DE LA BANDE-DESSINEE, EST-CE QU'IL Y A DES Å’UVRES DE TOI QU'ON PEUT TROUVER ?
J'ai travaillé dans la BD au Mexique, mais ça a disparu. C'était dans les années 90. Je travaillais dans un éditorial Mexicain dès l'âge de quinze ans, et cet éditorial adaptait des classiques de la littérature en BD justement. J'ai travaillé aussi beaucoup avec mon père, qui était pionnier de l'animation au Mexique. J'ai travaillé avec lui pour Disney et Marvel. À l'époque on faisait des petites adaptations de Conan le Barbare et de Wolverine.
ET DONC TU VIS VRAIMENT DE TON ART A L'HEURE ACTUELLE ?
"Vivre", c'est un peu entre guillemets. En France, parfois, l'art est un peu surévalué. Je le dis sans méchanceté, mais à  partir du moment où tu dis que n'importe qui est un artiste, ça peut poser des problèmes. Pendant des années j'ai étudié en école d'art au Mexique. J'ai travaillé l'art classique, la perspective, l'anatomie, la peinture, la composition, les couleurs. Quand je suis arrivé, j'ai été un peu surpris de voir qu'ici, c'est pas grave si tu es un artiste ou pas. Le tout c'est d'avoir le contact, le réseau, les parents...
TU PENSES QU'IL Y A DES IMPOSTURES.
Oui, et je peux te donner un exemple : j'ai fait une petite expo à  Saint-Tropez. La salle coûtait 3000€ la semaine. À côté de moi il y avait un garçon qui venait de New York, qui avait étudié à  l'école d'art de New York ; et sincèrement, ses tableaux étaient fantastiques. Son tableau le plus cher coûtait 1200€. Le miens, c'était à  800€ mais je reconnais que visuellement mon art est particulier. Je travaille beaucoup en noir et blanc ; et à  l'époque je travaillais sur le tarot de Marseille dont j'interprétais toutes les cartes à  ma sauce. Ma collection était évaluée à  10 000 pour les quarante-deux tableaux. Je n'ai pas trouvé de mécène, donc j'ai payé l'exposition moi-même, pour finalement ne vendre qu'un seul tableau à  400 €. Certains autres artistes étaient loin d'avoir la même passion, ou le même niveau ne serait-ce que de mon voisin, ont été expertisés à  beaucoup plus, et ont vendu beaucoup plus.
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ET POURTANT, AUJOURD'HUI, ON DIRAIT PLUTOT QU'ON ESSAYE DE CACHER L'ART, ET DE DEVALORISER LA CULTURE. NOTAMMENT AVEC LA FERMETURE DES LIBRAIRIES...
C'est vrai aussi. Et pour tout te dire, depuis treize ans que je suis en France, j'ai passé huit ans à  me battre avec la SACEM pour en faire partie. Une fois je cherchais aussi des subventions pour un projet, et on m'a répondu que ma musique n'était pas de la musique contemporaine. Ensuite on te demande combien de vues tu as sur youtube. En dessous d'un certain nombre, tu n'as rien. Ensuite, on te demande d'avoir 10 000 vues pour commencer à  toucher quelque chose sur le streaming.
C'EST CE QUE DISENT BEAUCOUP D'ARTISTES. LE STREAMING EST UNE ESPECE D'ABANDON DES AUTEURS.
Hé oui, et encore une fois, je suis tout seul. On me demande "Qu'est-ce que vous faites dans la vie ?" Je réponds que je suis artiste. Et je ne sais pas faire autre chose. Et ça ne veut pas dire que je suis un feignant. Et c'est pour pouvoir faire ça que je me suis mis aux réseaux sociaux ; notamment pour joindre les associations. Aujourd'hui si tu as du succès, c'est grâce aux associations qui touchent des aides de l'état.
ET EN CE MOMENT LES ASSOS NE PEUVENT PAS AGIR.
Il y a ça, et le problème aussi c'est que des associations te demanderont de l'argent aussi. Mettons, pour adhérer, c'est 45€ à  l'année, ensuite, si tu veux un article, c'est 30€, si tu veux qu'on partage ta vidéo c'est 10€... Quand tu vois les frais que tu mets pour tenter d'être vu, ça devient vite ingérable. Ceci dit, je ne veux pas passer pour le migrant révolutionnaire qui déteste tout. Pour moi les institutions en France sont un paradis. Le fait d'appartenir à  la SACEM, pour moi c'est un orgueil personnel. Il n'y a rien de similaire en Amérique latine, qui te donne un statut social. Ici tu n'es pas un paria comme en Amérique latine. Je dis simplement qu'il y a des difficultés.
ET DONC EN DEPIT DE CES DIFFICULTES, QUAND PENSES-TU SORTIR TON ALBUM ?
Au final, comme d'habitude, je vais investir tout moi-même, en attendant des subventions ; et je vais continuer à  étendre mon réseau sur le net. Je pense que le prochain single sortira fin décembre. Pour The Sins of Skin je ferai prochainement la première, et le streaming. Il manquera le côté physique encore, mais je ferai le pressage une fois que j'aurai payé les droits.
COMMENT LES GENS PEUVENT TE SOUTENIR ?
Pour moi, comme pour beaucoup d'artistes, ce sera à  travers le crowdfunding, notamment sur bandcamp. C'est également possible sur mon site web. Si les gens aiment le projet, ils peuvent faire des donations, et il y aura toujours des contreparties de ma part. Je vais bientôt créer un projet sur ulule, mais il faut d'abord que les gens me connaissent. C'est pour ça aussi que je veux faire l'édition spéciale de l'album avec un Ouija. Ce sera décoré dans le style un peu art baroque. Je ferai un concours aussi pour gagner les dessins originaux. Pour les participations il y aura également mon tarot de Marseille... Je vais mettre plein de petits cadeaux limités comme ça, pour motiver !