La paix par le bruit : Vomir/Corporal Abuse (split)

Europe

Experimental

France

Musique

Noise

Verveneyel

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1 août 2023

" Vous savez, chers lecteur, musicalement, je ne recule devant pas grand chose. J'ai tendance à  me laisser assez facilement emporter par la sincérité quand elle se présente à  moi, et à  soutenir dans la pratique la fameuse maxime de Victor Hugo : "La musique, c'est un bruit qui pense." "
"Le pouvoir du Christ te pousse à  céder! Le pouvoir du Christ te pousse à  céder ! Le pouvoir du Christ te pousse à  céder !"
Pas besoin de le dire une quatrième fois. Vous avez tous une image qui vous est soudain venue en tête. Vous revoyez Linda Blair, et Max Von Sydow, et Jason Miller... Et cette chambre à  la lumière surnaturelle, ce visage mutilé. Et vous vous souvenez ce qui se passe dans le film après que, sans relâche, nos deux exorcistes aient répété cette phrase ? "Le pouvoir du Christ te pousse à  céder !"... Exact cher lecteur, il ne se passe pas grand chose, le démon ne cède pas, la petite fille n'est pas sauvée.
Et c'est exactement la même chose qui se passe avec la glorieuse compilation Haunted by Words of Gods/Abyssal Plains of Chaos des Lyonnais d'Hysteria (à  ne pas confondre avec un autre groupe qui vit à  Babylone dans le bruit de fond qui résonne). La face A de l'édition vinyle commence en crachotant cette même phrase à  plusieurs reprises pour ouvrir le morceau éponyme, et, bien loin d'achever son office apotropaïque, la réplique n'amène pas la paix, mais déchaîne les démons. C'est en effet l'album et non l'EP qui ouvre le bal.
Description de l'image
Lancé à  toute allure, c'est le Brutal Death Metal de la meilleure facture que l'on se prend dans la face, de quoi nous tenir en haleine pour un peu plus d'une heure.
Mais alors, quelle est la raison d'être de cette compilation ? Ma foi c'est bien simple : le groupe fête (un peu en avance ceci dit), le vingtième anniversaire de son premier EP, et son premier album, sortis respectivement en 2002 et 2006, grâce à  la coopération d'Adipocere Records. En résulte une magnifique édition anniversaire gatefold double vinyle, parfois colorés.
La cover subit également une petite mise à  jour, puisqu'on abandonne les ruines froides de l'EP et le monstre hybride entre Jérôme Bosch et Francis Bacon pour une nouvelle créature un tantinet plus humanoïde, sans visage, plus résolument proche d'un Francis Bacon seul, perdue dans une sorte de sanctuaire aux colonnes monolithiques. L'effet est garanti, on retrouve d'ailleurs presque un clin d'oeil à  l'esthétique de certaines Å“uvres de Spiros Antoniou. Je n'ai pas réussi à  trouver le responsable de cette belle pièce, qu'à  cela ne tienne, bonne pioche !
Et le moins qu'on puisse dire, c'est que dès ses débuts, le groupe avait décidément tout pour plaire ! Qu'il s'agisse de l'album ou de l'EP, les deux sont exécutés avec énormément de professionnalisme, y compris dans la production, plutôt léchée.
Description de l'image
Le groupe illustre un style de Brutal Death Metal rapide, assez technique, (avec des avalanches de batterie quasi constantes,) et très mélodique, ce qui pourrait presque nous laisser dire qu'on y trouve des influences de Black Metal va-t-en guerre. C'est de la brutalité racée, un peu à  la manière d'un Deicide époque Ralph Santolla, ou un Vital Remains époque Dechristianize. Lancez-moi des cailloux si vous voulez, mais j'appuie cette ressemblance avec les projets de Glen Benton pour la simple et bonne raison que la voix de Sylvain Ostengo, tant dans les graves que les aigus, me rappelle énormément l'illustre sataniste. Et dans ma bouche, croyez moi, ce n'est pas un reproche : le chant sur la musique d'Hysteria est très puissant, épique et profondément maléfique.
On est également content de voir que le groupe n'a pas peur non plus de laisser à  ses morceaux le temps de murir, car certains font plus de sept minutes, comme le majestueux "Work of Torment". Parlons-en de ce morceau totalement dingue, genre de "Master of Puppets" du Brutal Death, qui se paye le luxe d'avoir une partie plus douce, mélodique et aérienne en plein milieu, pour un vrai régal des oreilles. Voilà  un autre point fort : la composition est vraiment riche, animée par des motifs stylistiques certes, mais intelligemment mis en Å“uvre, avec des respirations, des atmosphères changeantes, et un feeling aux petits oignons.
Hé bim, juste après ça, arrive la face D, l'EP originel, là  ou tout à  commencé. Et l'extase se poursuit à  vrai dire, l'ordre n'est pas mal choisi, car après un morceau aussi mélodique que le suscité "Work of Torment", "Taking Side with the Devil... The Ritual" est un excellent successeur à  l'oreille, là  encore épique, assez délicat, avec une grosse dose d'accouplement à  du Black Metal belligérant qui n'aurait pas fait honte au Gorgoroth de la bonne époque ou à  Dark Funeral. Le mélange est d'autant plus flagrant que la production de l'EP est un peu plus garage. La vingtaine de minutes de l'EP passe sans crier gare, toujours en haute volée.
Le groupe avait donc visé juste et avec beaucoup de maturité dès ses premiers méfaits. Mais alors le groupe s'est-il arrêté là  ? Car l'année 2019 dont je répète qu'elle était un très grand cru, n'a pas vu apparaître dans les bacs que cette compil' d'Hysteria, mais aussi un EP, From the Abyss to the Flesh. Et alors, il est bon cet EP ? Vous le saurez... DANS UN AUTRE ARTICLE ! Allez, en attendant, aller écouter cette belle réédition abreuvez vous de bon son, et à  très vite !